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BAC ES economique et sociale option ES
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26 avril 2008

Economie, petit plus

Extrait du livre d'apprentissage de des SES de terminale :


Croissance, développement et changement social

L'habitude à été prise de distinguer croissance, phénomène quantitatif, et le développement, phénomène qualitatif.

La croissance serait l'augmentation, sur longue période (ce critère la distingue de l'expansion), de la production de biens et de services. Le plus simple consiste dans ce cas à la mesurer par l'augmentation du PIB en volume. On peut alors distinguer la croissance extensive, proportionnelle à l'accroissement des facteurs de production (on produit plus parce qu'on utilise plus de facteurs de production: de terre, de travail, de capital...), et la croissance intensive qui résulte de gains de productivité (eux-même dus aux progrès techniques, aux innovations...). La croissance intensive peut être mesurée par le PIB en volume par habitant; un indicateur proche est le revenu par habitant, donc le revenu moyen par personne, ce qui permet d'établir un lien avec la croissance du niveau de vie.

Il convient bien sûr de savoir relativiser la signification de ces indicateurs: le périmètre du PIB est celui de l'économie monétaire (il exclut donc les relations non monétaires, bénévoles, dons, particulièrement importantes dans les pays pauvres), le revenu moyen peut masquer de très importantes inégalités.

    Le développement serait une transformation, sur longue période aussi, des structures économiques graphiques et sociales (industrialisation, urbanisation, salarisation, tertiarisation...), mais aussi des représentations (système de valeurs, conception du monde) et des comportements (rationalisation, calcul économique...). Bien que cette notion soit qualitative, il existe des indicateurs de développement tels que l'IDH.

Ces premières définitions mettent déjà en évidence l'interdépendance entre croissance et développement :

La croissance n'est jamais seulement une évolution quantitative, elle s'accompagne nécessairement d'une mutation des structures (ex: du seul fait de l'élévation du niveau de vie, la structure de la consommation se modifie); de plus, elle apparaît comme une condition nécessaire du développement (pour que la qualité de la vie s'améliore il faut pouvoir se nourrir, loger, soigner, se qui implique la production de biens et services en quantités suffisantes)

    Le développement, si on l'associe à une augmentation du bien être, apparaît comme la justification de la croissance, mais aussi comme l'une de ses conditions (santé, éducation sont des conditions de l'efficacité du facteur travail).

      Cette relation est confirmée par la définition donnée par Simon Kuznets, lors de son discours de réception de prix Nobel en 1971 : « La croissance économique d'un pays peut être défini comme une hausse de longue période de sa capacité d'offrir à sa population une gamme sans cesse élargie de biens économiques; cette capacité croissante est fondée sur le progrès technique et les ajustements institutionnels et idéologiques qu'elle requiert. » Réciproquement? François Perroux, célèbre pour avoir évoqué le « développement de tout l'homme en chaque homme », définit celui-ci comme « la combinaison des changements mentaux et sociaux d'une population qui la rendent apte à faire croître, cumulativement et durablement son produit réel global. »





I/ Le développement humain: un aveu ?


Cette imbrication entre la croissance et le développement pose problème: cette dépendance du développement vis-à-vis de la croissance n'est-elle pas la conséquence d'une conception particulière, occidentale, du développement?

On trouvait en effet, au cours des années 1970, des auteurs qui parlaient:

  • de « croissance sans développement », pour désigner la situation de pays engagés dans un processus de « modernisation » de leur économie, dont ne profite qu'une infime minorité de la population et les firmes étrangères venues s'implanter pour exploiter les ressources naturelles ou de la main d'oeuvre « bon marché » (croissance extravertie dont les bénéfices sont expatriés, sans retombées locales); on peut même jusqu'à évoquer le spectre du « développement du sous- développement » dés lors que cette modernisation importée a pour conséquence principale la destruction du tissu économique local (ruine des petits paysans, des artisans, des industries dans l'enfance), la destruction de la société (acculturation, exode rural massif et urbanisation sauvage, tertiarisation parasitaire...).

  • De « développement sans croissance », pour en appeler à un mode de développement alternatif, refusant l'accumulation pour l'accumulation, soucieux de préserver l'environnement, l'intégration sociale, l'identité culturelle, etc.

Il apparaît ainsi que la notion de développement est loin d'être univoque. Certains la distinguent de la notion de « progrès économique » afin de la préserver de toute connotation normative. Cela semble pourtant peine perdue. Prenons par exemple l'objectif que le PNUD donne au « développement humain », dans son rapport de 1991: « élargir la gamme des choix offerts à la population, ces choix doivent comprendre des possibilités d'accéder au revenu et à l'emploi, à l'éducation et aux soins de santé, et à un environnement propre ne représentant pas de danger. L'individu doit aussi avoir la possibilité de participer pleinement aux décisions de la communauté et jouir des libertés humaines, économiques et politiques. » comment ne pas applaudir? Mais cette définition est normative:

    • elle fait référence  à des besoins en termes de niveau de vie, de santé, d'éducation (ce que Perroux appelait « les coûts de l'homme »); or les anthropologues ont montrés depuis longtemps la relativité socioculturelles des « besoins ».

    • Elle fait référence à une norme écologique dont on ne se souciait guère autrefois, puis célèbre l'individu et ses libertés, qui sont des valeurs occidentales.

      C'est cette référence à des normes et des valeurs, qui nous paraissent universelles parce que se sont les nôtres, que mettent en avant ceux qui analysent le développement comme une idéologie occidentale, voir le masque de la domination occidentale du reste du monde.

Comme le rappelle opportunément Gilbert Rist dans un ouvrage récent, l'ère du « développement » a été inaugurée par le point IV du discours d'investiture du président américain Harry Truman le 20/01/1949. En voici un extrait : « Il nous faut lancer un nouveau programme qui mette les avantages de notre avance scientifique et de notre progrès industrielle au service de l'amélioration et de la croissance des régions sous-développées.

           

Cette période est celle de la sortie progressive de la colonisation, de l'émergence du tiers monde, mais aussi de la guerre froide. Truman précise que l'aide sera accordée aux pays « libres » ce qui signifie extérieur à la zone soviétique. S'impose alors une nouvelle représentation du monde : elle distingue les pays développés qui servent de modèle, et les pays sous-développés qui apparaissent dés lors comme « en retard ». l'accompagne une logique imparable : le développement en tant que source de bien-être est désirable en soi; or, certains pays, occidentaux, ont trouvés la recette qui conduit à la société d'abondance; les autres pays sont donc invités à les rejoindre en suivant le même chemin.




II/ Le développement durable : un pléonasme ?


Un demi-siècle après le point IV, le monde a beaucoup changé – l'empire soviétique s'est effondré, les NPI (niveaux pays industrialisés) ont émergé, le tiers monde a éclaté – mais le discours dominant est-il si différent? Après l'éphémère « nouvelle ordre économique international » promis au milieu des années 70, après la crise de la dette et de la chape de plomb des politiques d'ajustement structurel au cours des années 80, après la globalisation et les crises financières des années 90, après d'innombrables rapports de commissions travaillant sous l'égide des organisations internationales, peut-on continuer à croire en la promesse du développement ?

Oui, plus que jamais, depuis que la commission présidée par Mme Gro Harlem Bruntland a inventé, dans son rapport de mars 1987, la notion de « développement durable ». voici un extrait de ce rapport: « le genre humain a parfaitement les moyens d'assurer un développement durable, de répondre aux besoins du présent sans compromettre la possibilité pour les générations à venir de satisfaire les leurs ». le développement étant durable par définition, que peut bien signifier une évolution durable durable? Serait-ce un aveu inavouable: ne chercherions nous pas à nous rassurer au moment même où il s'avère que notre modèle de développement ne peut pas durer, surtout s'il s'étend à toute la planète? À moins que le développement durable soit la redécouverte honteuse de la « croissance zéro », préconisé par le rapport Meadows du début des années 1970... apparemment pas puisqu'on lit quelques lignes plus bas « nous sommes capable d'améliorer nos techniques et notre organisation sociale de manière à ouvrir la voie à une nouvelle ère de croissance économique. »

donc il s'agit bien de notre bon vieux développement dont on ne sait trop s'il est le but (la récompense) ou le moyen de la croissance économique.


Si le développement signifie le bien être et la liberté pour tous, « les droits de l'homme », la démocratie, comment ne pas le désirer, mais s'agit-il d'une réalité ou d'un idéal? Si l'on éprouve périodiquement le besoin de renommer le développement, de l'affubler d'épithètes étranges tel que « humain » (il est donc inhumain?) ou durable (pour le faire durer?) n'est-ce pas parce que l'idéal tarde à se concrétiser? Si cet idéal est celui des pays occidentaux, est-il universalisable?

Ce sont quelques une des questions à se poser avant de faire un usage contrôlé de la question de développement.




III/ Et le changement social?


Si le développement est défini comme l'évolution des structures économique et sociales indissociable de la croissance économique, alors il s'accompagne aussi nécessairement d'un « changement social ». En tant que réalité observable celui-ci n'appelle donc pas d'investigation complémentaire. La distinction entre développement et changement social dans les sociétés « modernes » ne peut se justifier que par une séparation entre l'économie et la sociologie: les économistes analyseraient sous le nom de « développement » ce que les sociologues étudieraient sous le nom de « changement social ». Il est vrai que les premiers sociologues, sous l'influence des philosophies de l'histoire ont voulu découvrir les lois du changement social. Auguste Comte, l'inventeur du néologisme « sociologie », est célèbre pour voir énoncer la « loi des trois états » selon laquelle l'humanité passerait nécessairement par trois phases, cette évolution s'expliquant par les progrès de l'esprit humain. L'époque est alors au scientisme (on croit en la toute puissance de la raison, qui permettra de découvrir les lois de la vie sociale comme elle parvient de découvrir les lois de la nature) et à l'évolutionnisme: on pense que l'histoire de l'humanité a un sens immanent, qui est celui du progrès irréversible de l'homme vers la civilisation, un peu comme l'individu qui passe de l'enfance à l'âge adulte; l'évolution est supposée aller du simple au complexe, de l'homogène vers l'hétérogène.

Cette vision incite par conséquent à rechercher les lois du passage d'un stade de l'histoire à un autre,ou des tendances générales. Elle imprègne les auteurs du XIXe et du début du Xxe. On la retrouve par exemple, à des degrés divers, chez Tocqueville, qui met en évidence un mouvement irrésistible vers l 'égalité des conditions, chez Marx, qui privilégie le développement des forces productives et théorise la succession des modes de production, chez Durkheim qui s'interroge sur le passage de la solidarité mécanique à la solidarité organique, chez Weber qui étudie le processus de rationalisation propre à la civilisation occidentale, etc.


L'histoire du Xxe siècle avec son cortège d'horreurs (guerres mondiales, nazisme, camps d'extermination, stalinisme) a rendu les sociologues plus prudents. On ne se risque plus aujourd'hui à réduire l'évolution d'une société à l'effet mécanique, déterminisme, de quelques facteurs hypostasiés. Certains contextes sociohistoriques stabilisés permette de repérer des tendances, tel que l'individualisme ou la montée des valeurs postmatériastes, mais les auteurs rigoureux se gardent d'en déduire des prédictions. Il n'existe donc plus, à proprement parlé,de théories globales et synthétiques du changement social.

Cela s'explique en fait par ne raison fort simple : parmi les facteurs principaux du changement social il y a les innovations et les conflits sociaux. Or, les innovations, comme l'issue des conflits sociaux sont imprévisibles. On peut trouver de multiples analyses de nombreux changements sociaux, mais on chercherait en vain LA théorie contemporaine du changement social.







Le PIB n'est pas un BIB



On reproche souvent au PIB de ne pas « tout » évaluer. Il oublierai ainsi l'économie « souterraine », « non officielle » ou informelle (travail au noir, c'est-à-dire sans que soit acquittés les impôts et cotisations sociales dus, et sans respecter la législation du travail) et la fraude ou l'évasion fiscale. C'est inexacte. Les comptables nationaux s'efforcent d'introduire une évaluation de ces activités; ce n'est généralement bien sûr ni simple ni très précis; mais pas toujours : en France par exemple, les vols dans les magasins sont assez bien évalués globalement (il augmente de revenu des ménages et leur consommation) et la « méthode Italienne » dont l'utilisation se généralise en Europe permet de beaucoup mieux cerner l'ampleur du travail au noir. En 1995, les corrections pour travail au noir, fraude,etc représentaient 6,5% du PIB français, c'est-à-dire trois fois la VA de l'agriculture.


Le nouveau système de comptabilité national défini par l'ONU en 1993 va plus loin puisqu'il prévoit d'intégrer dans le PIB les activités illégales, c'est-à-dire la production de biens et de services interdits par la loi (drogue interdite et autres activités qui ne peuvent pas être exercées autrement que clandestinement), ce qui devrait rendre un peu plus réalistes les comptes nationaux de pays tel que la Colombie. Les pays de l'UE ont décidés de ne pas évaluer cette production illégale parce qu'elle n'y joue qu'un rôle marginal.

 

              Le PIB ne prendrait pas en compte le production domestique, soit pour la France, selon la méthode d'évaluation choisie, une valeur comprise entre le quart et la moitié du PIB. C'est exact et cela est gênant pour au moins deux raisons : d'une part, la production domestique n'a pas le même poids dans les différents pays, ce qui rend difficile les comparaisons dans l'espace (indépendamment de la question des parités du pouvoir d'achat); d'autre part l'importance relative de cette production dans le PIB diminue au fur et à mesure de la croissance économique parce que celle-ci se traduit par la « marchandisation » de nombreuses activités qui relevées jadis de la sphère domestique, ce qui biaise la comparaison temporelle (la croissance du PIB est supérieure à celle de la richesse produite).

               Autre critique classique : le PIB compterait comme production de richesse des activités nuisibles ( production de cigarettes...) et des activités destinées à réparer les conséquences des nuisances dues à la production (dépollution...). Enfin le PIB oublierait qu'une partie de la production est fictive, car elle a pour origine un prélèvement sur les stocks (déforestation) ou est le résultat d'une baisse de la qualité des stocks (eaux polluées, paysages dévastés).

               Tous ces reproches sont fondés mais manquent leur cible. Reprocher au PIB d'être un mauvais indicateur du bien être ou de la production utile est vain parce que le PIB n'a jamais été construit dans cette perspective : ce n'est pas un bonheur intérieur brut (BIB) mais d'abord et avant tout un indicateur pour la politique économique, notamment conjoncturelle. Dans cette perspective, c'est moins son niveau que sa variation relative qui intéresse l'économiste. Sur longue période, cette variation est elle même très délicate à interpréter car les conditions de vie et les produits changent trop pour qu'on puisse considérer qu'on mesure la croissance d'un ensemble homogène.

                Nous sommes dans une société qui veut toujours réduire le qualificatif à du quantitatif et le quantitatif à le monétarisme. Pourquoi participerions-nous à ce réductionnisme? N'est-ce pas un symptôme d'aliénation que de revendiquer que le PIB aille encore plus loin dans cette réification des rapports sociaux? Faudrait-il mesurer nos actes, y compris les plus intimes, au prix du marché pour que le PIB est un sens?

               Pour tenter des comparaisons de « bien-être » nécessairement très approximatives, mieux vaut laisser tomber le PIB, qui est un indicateur de moyens (biens et services, résultat de l'activité productive, mais des moyens pour satisfaire des besoins individuels et productifs), et construire un indicateur de résultats (espérance de vie, illettrisme). C'est la voie explorée par les inventeurs de l'IDH.

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